La culture pour tous

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La ville de Lyon dépense 20 % de son budget pour sa politique culturelle, bien plus que d’autres grandes villes. C’est un atout qui nous permet de façonner une vie culturelle, et une base sur laquelle porter un vent de renaissance, à condition de reposer des questions fondamentales sur la nature et le rôle de la culture. Il nous faut ainsi briser avec certains dogmes qui font que notre culture est essentiellement oligarchique, l’art savant et la culture classique étant le plus souvent une marque de reconnaissance d’un petit monde qui n’en porte pas le fondement révolutionnaire, tandis que l’on livre les classes populaires à « leur culture ». Le constat est sans appel : seul 30 % de la population, âgée, aisée et diplômée, profite des événements de l’opéra, des théâtres classiques et d’art lyrique.

Bien sûr il y a les musées et leurs experts qui peuvent s’adresser avec plus ou moins de ferveur à ceux dont la curiosité a déjà été suscitée. Mais pour le plus grand nombre, ce ne sera pas une culture émancipatrice qui viendra frapper à leur porte, mais au contraire celle de la mondialisation financière, c’est-à-dire du jeu, du divertissement et de la consommation de masse. Habillée du jeu d’ombre des relations par réseaux sociaux, cette culture nous plonge dans un monde d’opinions et d’impulsions immédiates, bien incapable de forger le caractère. Rien ne demande à être pensé d’un point de vue universel, et aucune recherche de beau et de vrai ne vient contraindre la pensée.

André Malraux disait que « la culture est ce qui répond à l’homme quand il se demande ce qu’il fait sur terre. » Il s’agit bien d’échapper à l’empire du présent, et pour cela il est essentiel d’avoir accès à ce qu’ont fait les hommes avant nous, et notamment aux plus grandes œuvres d’arts de la culture classique. Chacun peut en avoir son propre jugement, encore faut-il les connaître, ce que nous considérons être un droit inaliénable.

Dans les arts picturaux, la musique, le théâtre et la science, notre programme vise à remettre le dialogue et l’échange au cœur de la vie culturelle. Et nous souhaitons pour cela mettre à contribution tous les acteurs de la vie culturelle lyonnaise.

Tout d’abord dans le domaine des arts picturaux, nous proposerons aux étudiants des Beaux-arts d’exposer les grandes œuvres, de présenter au grand public le contexte historique ainsi que l’idée qu’a voulu transmettre l’auteur de chacune d’elles. La ville devra commissionner auprès de nos jeunes diplômés des reproductions de tableaux de Maîtres, afin que ceux qui ne peuvent les voir au Musée du Louvre par exemple, puisse accéder à ces joyaux. Des salles municipales, converties en « musée de l’imaginaire » pourront être mises à disposition.

Donner à voir « la science en train de se faire »

education_325De même, dans le domaine scientifique, les étudiants à partir de la deuxième ou troisième année pourraient être investis d’une mission de médiation culturelle. En plus de créer une vocation scientifique tournée vers le grand public, cela leur permettrait d’obtenir une rémunération en exerçant un métier en relation avec leur formation et leurs recherches.

L’objectif est de reproduire à Lyon l’esprit de frontière dans lequel fut conçu le Palais de la découverte à Paris, en multipliant les occasions de contacts directs et passionnés entre chercheurs, étudiants et grand public, autour des grandes découvertes passées et à venir. Chacun s’y retrouve en chercheur et découvreur, et non en ignorant à instruire. Il faut y expérimenter avec le public des principes physiques comme l’électrostatique, l’électromagnétisme, les réactions nucléaires, l’optique, l’astrophysique, etc, et découvrir leurs applications dans les machine-outils et l’économie productive en général.

Les espaces de diffusion culturelle tels que les maisons de la culture, les musées et les salles de conférence doivent être mises à contribution pour accueillir de telles animations. Mais cela soulève le rôle du Centre de Culture Scientifique, Technique et Industrielle de Lyon (CCSTI) aujourd’hui intégré à l’Université de Lyon. Ces 15 dernières années, ses acteurs ont été constamment assaillis de sollicitations, bien au-delà de leurs moyens financiers et humains. Preuve qu’il y a un appétit à assouvir et une dynamique qui ne demande qu’à être lancée avec un peu de vision. A ce titre, le CCSTI doit être doté de moyens et missions bien plus conséquents, notamment pour contribuer à l’essor dans notre ville d’associations ayant développé une pédagogie de la découverte scientifique.

Citons par exemple Ébulliscience à Villeurbanne, une salle d’expérimentation où des animateurs initient à la méthode scientifique, invitent à se poser des questions autour d’expériences simple à manipuler soi-même ou en groupe. On y apprend notamment à faire des hypothèses et les tester, et à ne pas craindre de se tromper car d’autres hypothèses doivent alors se faire jour et on avance. On devrait d’ailleurs encourager d’autres associations de ce type à s’installer à Lyon et développer des partenariat avec les écoles. Proposer d’accueillir notamment une Maison pour la science, dispositif développé par l’association La main à la pâte, pour y tisser des liens forts entre chercheurs, enseignants et ingénieurs de la région, afin de revigorer l’enseignement scientifique.

Le musée des Confluences aura coûté au Lyonnais 5 fois plus qu’initialement annoncé et sa construction a pris un retard considérable. Après tant de déconvenues, les lyonnais sont en droit d’exiger de ce musée des sciences et des sociétés qu’il rompe avec l’académisme habituel. Le secteur sciences et techniques devrait être le centre névralgique du programme « Palais de la découverte » de la ville. Pour assumer ce rôle, il faudra aménager des transports efficaces pour cet endroit qui n’a aujourd’hui ni métro ni parking (cf notre projet transport).

Il s’agira aussi pour le CCSTI de transformer la vision artificielle de la ville portée par l’actuelle Mairie de Lyon, et qui n’amène pas la population à s’intéresser au secteur industriel. Certes, le TISTRA (Tourisme Industriel Scientifique et Technique en Rhône-Alpes) organise bien quelques visites mais leur nombre reste dérisoire et la promotion qui en est faite est quasi-inexistante.

Ainsi, au-delà des nombreuses initiatives qui existent, c’est d’une véritable politique d’ensemble menée par un chef d’orchestre cohérent et déterminé dont on a besoin pour endiguer la mise à l’écart culturelle qui touche les couches populaires.

La chaîne de télévision CAPCANAL, largement financée par la ville, devra servir de relais aux nombreuses activités de médiation culturelle que notre projet propose de développer dans notre ville, et être mieux mise de l’avant par la même occasion.

Porter la culture au seuil de chaque porte

Ce que nous défendons à Solidarité & Progrès, c’est le droit pour tous d’accéder aux trésors de la culture humaine, celle qui s’adresse à la créativité de chacun, la met au défi, la grandit et œuvre à développer un sens de dignité partagée. L’enjeu n’est donc pas de savoir comment on va équilibrer les budgets entre d’un côté la « culture d’élite » et de l’autre la « culture populaire », les arts urbains qui seraient soi-disant l’apanage naturel de la plus grande partie de la population. Il s’agit plutôt de donner à tous l’accès à ce que l’humanité a transmis du meilleur d’elle-même.

Cela implique d’organiser des événements là où les gens vivent, particulièrement les populations modestes qui ne prendront pas d’eux-mêmes l’initiative d’aller à un concert classique, à l’opéra ou au théâtre. De nombreux exemples, que l’on peut trouver sur internet, montrent l’émerveillement et le bonheur que génèrent des concerts impromptus dans les rues et les lieux publics.

logo_cultureSeulement, dans l’adaptation aux politiques d’austérité budgétaire, nous nous apprêtons sans doute à nous séparer d’un des deux grands orchestres lyonnais. Encore une fois, notre bataille pour faire sauter le verrou financier s’illustre ici (cf notre sujet Sauvons les communes pas les banques). Nous pensons en effet qu’il faudrait absolument garder ces musiciens, tout en changeant une partie de leurs activités pour qu’ils animent de nombreux ateliers musicaux, dans les quartiers, aux abords des lieux de travail, à la sortie des écoles, dans des activités péri-scolaires (voir notre programme sur l’éducation), et dans les lieux publics en général. Renouveler le public et l’engouement pour la musique et l’art demande d’aller chercher les gens là où ils sont. Les quelques événements organisés deux à trois fois par an par nos grands orchestres dans les quartiers sont bien insuffisants, et même décourageants pour les musiciens, car il manque une coordination avec les acteurs de ces lieux de vie pour y créer l’attention du public et des échanges enrichissants. Un même effort doit être encouragé dans le théâtre.

Lorsque notre slogan de campagne dit « Lyon n’est pas la City de Londres ! », il s’agit donc d’affirmer que notre ville doit proposer un avenir à tous ses habitants, et pas seulement aux quelques fortunés et chanceux qui tireraient leur épingle d’un jeu fait de clivages sociaux et culturels. Avec Lyon2014 ville pionnière, nous nous battons pour que chacun s’approprie les grandes réalisations du passé pour pouvoir participer à la création de notre avenir commun.

Julien Lemaître & Arnaud Beils

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